Vigile et Une colonie, deux coups de cœurs

Texte | Raphaëlle Hamel

Je ressors du festival « Vues dans la tête de Jeanne Leblanc » avec deux coups de cœur : le court métrage Vigile, de Xavier Beauchesne-Rondeau, et le film Une colonie, de Geneviève Dulude-De Celles.

D’abord, Xavier Beauchesne-Rondeau a manifestement créé Vigile pour dénoncer le racisme. Le réalisateur met en scène un père de famille blanc qui rallie de ses semblables pour se protéger contre les « crimes de la rue ». Par contre, celui-ci s’en prend seulement aux autres races que la sienne. Sans vendre le punch, on peut révéler qu’un jeune Noir et ses amis arabes se rassembleront pour concocter une petite vengeance.

La mise en contexte de l’histoire est exécutée de façon très ingénieuse. On voit le père raconter une histoire d’agression sur sa fille par le biais d’une vidéo qui sera publiée. À la fin du court-métrage, cette même scène est reprise, mais le père coupe la vidéo pour dire à sa fille d’agir plus dramatiquement.

Le thème du racisme est aussi présent dans le film Une colonie, puisque la jeune Mylia se lie d’amitié avec un garçon des Premières Nations, qui se fait intimider par d’autres élèves. La jeune fille qui habite dans un village près de celui des Abénakis et monte au secondaire. Elle apprend à s’ouvrir aux autres et à elle-même. Elle se découvre à l’aide de certaines rencontres à sa nouvelle école, de moments vécus avec sa famille, et elle se rend compte qu’elle ne veut pas entrer dans un moule prédéfini.

L’univers de la réalisatrice Geneviève Dulude-De Celles est beaucoup plus axé sur le documentaire, comme dans Bienvenue à F. L., qu’elle a réalisé en 2015. On retrouve cette influence dans Une colonie, où elle nous montre brillamment la réalité des élèves du secondaire et la réalité des Premières Nations. La réalisatrice utilise des acteurs du même âge que les personnages, soit 12-13 ans, pour jouer les jeunes de 1re secondaire, des acteurs des Premières Nations pour jouer les Abénakis et… des livres scolaires réellement utilisés au Québec. C’est aussi la caméra qui suit les personnages et non l’inverse, comme dans un documentaire.

La réalisatrice a aussi un penchant pour le thème de l’adolescence qu’elle représente extrêmement bien dans ses œuvres. Lors du festival, elle a expliqué avoir commencé par son documentaire, qui lui aurait donné envie de poursuivre dans l’univers de l’adolescence en réalisant Une colonie. Tout au long du film, la caméra est à la hauteur de Mylia, le personnage principal. Cet angle bien pensé permet de se mettre dans la peau de l’adolescente. On remarque aussi que, lors des déplacements en auto ou en autobus, Mylia a toujours la tête appuyée sur la fenêtre. Ce cadrage particulier amène une certaine compréhension imagée de l’histoire. Au départ, dans l’autobus, le cadrage soulève la distance entre elle et le reste du monde. Ensuite, elle rencontre son nouvel ami avec un cadrage serré. Finalement, la voiture l’arrache de son cocon pour l’amener vers du nouveau. La façon dont ces scènes sont tournées montre la dramatisation qu’on tend à s’imaginer à cet âge.

Émilie Bierre, interprétant Mylia, est une actrice de grand talent pour ses 16 ans. Elle a d’ailleurs gagné le Prix Écrans canadiens[1] pour sa performance dans Une colonie. Son jeu d’acteur est impressionnant. Lors de la scène où ils s’embrassent dans les toilettes, on ressent fortement son inconfort dans son visage et sa manière d’agir. Tout au long du film, c’est la même chose. Elle arrive à jouer les émotions comme si elle les vivait vraiment et nous les faire ressentir à travers l’écran.

Bref, Une colonie est un film tendre où l’on revoit les drames de l’adolescence, tout en reconnaissant rapidement le style de Geneviève Dulude-De Celles. Les personnages attachants, les scènes justes et l’envie d’écouter le film au complet constituent des aspects bel et bien présents. Pour ce qui est du court métrage Vigile de Xavier Beauchesne-Rondeau, mentionné au début, il vaut la peine d’être écouté avec une ouverture d’esprit. Ce court réussira à élargir les œillères de certains, j’en suis certaine !


[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Émilie_Bierre

À propos de Marie-Amélie Dubé

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