Texte | Mélanie Girard, directrice du Musée du Bas-Saint-Laurent

Solstice, 1994
Don de l’artiste
Emplacement Au Parc des Chutes, secteur du bas
Photographie : Jean-François Lajoie
Quiconque se promène dans Rivière-du-Loup aura tôt fait de remarquer la présence de plusieurs sculptures monumentales déployées un peu partout sur le territoire de la Ville. Certaines sont plus emblématiques, on n’a qu’à penser à L’accueil, une arche de lumière (André Fournelle) au carrefour giratoire à l’entrée ouest de la Ville (en page couverture du magazine) ou encore à Solstice (Gaétan Blanchet), à l’entrée du Parc des Chutes. Une quarantaine de ces sculptures, implantées dans les parcs et espaces publics de Rivière-du-Loup, font partie de la collection du Musée du Bas-Saint-Laurent et forment ce qu’on appelle le Circuit Publiqu’Art Desjardins.
La présence d’oeuvres d’art à certains endroits stratégiques d’une ville est sans contredit un élément signalétique fort qui met en lumière la place importante qu’une ville accorde à la culture. Publiqu’Art est ainsi né, en 2001, d’une intention conjointe de la Ville de Rivière-du-Loup et du Musée du Bas-Saint-Laurent : celle d’implanter un circuit d’oeuvres monumentales contemporaines dans divers espaces publics de la Ville. Cette dernière y voyait là une façon d’améliorer et de maintenir une qualité de vie pour les citoyen·ne·s. En outre, ce projet aspirait à donner une toute nouvelle entité à Rivière-du-Loup, qui serait perçue dorénavant comme une «Ville-Musée ». Notons qu’à l’époque, seules quelques grandes villes au Canada disposaient de programmes d’art public. À cet égard, ce projet a grandement contribué au rayonnement de la Ville de Rivière-du-Loup qui était alors considérée comme étant d’avant-garde. Pour le Musée du Bas-Saint-Laurent, le projet Publiqu’Art permet de démocratiser l’art en le rendant accessible à un plus large public, tout en faisant rayonner sa collection en art contemporain canadien à l’extérieur des murs du Musée.
Des grands noms de l’art contemporain canadien
Publiqu’Art rassemble des sculptures produites par les plus grands noms de l’art canadien, sculpteur·trice·s de réputation internationale, dont Armand Vaillancourt, André Fournelle, Pierre Leblanc, Robert Roussil, Tatiana Démidoff-Séguin, et plusieurs autres. Ces sculptures ont été acquises par le Musée à la suite de généreux dons de la part de donateur·trice·s et installées grâce à l’appui de partenaires (organismes publics et entreprises privées) qui se sont joints au projet.

Mémoire, 1991
Don de Madame Cécile Fournier-Matte
Emplacement Parc Blais, rue Lafontaine
Photographie : Jean-François Lajoie
Enjeux et perspectives
En déployant ainsi, sur le territoire de la Ville de Rivière-du-Loup, des sculptures monumentales, le projet Publiqu’Art permet aux citoyens et citoyennes d’être en contact, quotidiennement, avec différentes formes d’art. Toutefois, le fait que les oeuvres soient exposées aux intempéries, dans des conditions qui accélèrent la dégradation des matériaux, sans compter les risques de vandalisme, pose de nombreux défis liés à la conservation préventive. L’entretien d’une telle collection en extérieur exige d’importantes ressources humaines et financières, sans compter l’expertise de professionnel·le·s en matière de restauration souvent requise. À cet égard, ce projet ambitieux peut s’avérer lourd à porter pour une institution muséale de la taille du Musée du Bas-Saint-Laurent.
Cela dit, l’esprit de démocratisation de l’art dans lequel le projet a vu le jour s’avère toujours aussi pertinent, et ce, deux décennies plus tard. Dans cette optique, le Musée du Bas-Saint-Laurent projette de repenser la mise en valeur dans l’espace de certaines oeuvres. L’idée est d’assurer un meilleur dialogue entre les oeuvres et leur lieu d’implantation afin de créer un environnement propice à une vraie rencontre entre l’oeuvre et les citoyen·ne·s.
De plus, bien que les oeuvres impressionnent dès le premier coup d’oeil, une médiation plus approfondie permettrait davantage de faire comprendre la teneur de leurs propos aux passant·e·s et de mieux les accompagner dans l’appréciation de l’oeuvre. Que ce soit son historique, la démarche de l’artiste ou encore son importance par rapport à l’art et à la société, le développement d’outils de médiation culturelle permettrait, sans aucun doute, au grand public de les apprécier à leur juste valeur. Cela fait partie des actions que le Musée, de concert avec son partenaire, la Ville de Rivière-du-Loup, souhaite entreprendre au cours des prochaines années.

Passage, 1982
Don de Madame Jacqueline Brien
Emplacement Parc de La Pointe, secteur de la Côte-des-Bains
Photographie : Jean-François Lajoie
À l’aube de l’an 2000, Rivière-du-Loup, en partenariat avec le Musée du Bas-Saint-Laurent, a fait figure de précurseur en implantant bon nombre d’oeuvres d’art dans les parcs et espaces verts. Deux décennies plus tard, le projet est sans aucun doute mûr pour un remaniement afin d’actualiser la mise en valeur des oeuvres, d’assurer leur pérennité et ainsi permettre une meilleure appropriation de celles-ci par les citoyens et citoyennes. Francyne Lord, alors commissaire à l’art public de la Ville de Montréal, notait en 2010 un intérêt grandissant pour l’art public, véritable « composante de l’image de marque des villes », intérêt qu’elle attribuait notamment à l’émergence d’une économie de plus en plus orientée vers la créativité et l’innovation[1]. En ce sens, on ne saurait trop insister sur le rôle des arts et de la culture sur le développement local.
[1] Dans l’introduction au colloque OEuvres à la rue : pratiques et discours émergents en art public, 2010