Texte | Marie-Josée Saindon
NOUS ÉTIONS LE SEL DE LA MER
Roxanne Bouchard. VLB éditeur. Mai 2014.
D’abord et avant tout, ce roman m’a attirée par sa couverture poétique et son titre rempli de douceur. Nous étions le sel de la mer est un roman hybride entre le policier, puisqu’il y a bel et bien une enquête, et un récit lyrique. C’est le cinquième roman de l’autrice, mais c’est assurément ce dernier qui l’a propulsée dans les palmarès littéraires.
Catherine quitte tout pour se rendre à Caplan afin de refaire son histoire. Or, ce qu’elle apprend à son arrivée dans le petit village de pêcheurs viendra contrebalancer son plan de départ : retrouver sa mère qui la mise en adoption quelque temps après sa naissance. Durant son séjour, elle côtoie les pêcheurs du coin et découvre leur histoire, leurs coutumes, leur façon de vivre. Le temps, en Gaspésie, a une valeur bien différente de celle que les gens de la ville lui attribuent. Elle trouvera aussi sa mère… et fera la rencontre du sergent Moralès, lui aussi fraîchement débarqué sur le territoire afin de résoudre le mystère du cadavre qui s’est retrouvé dans les filets de deux pêcheurs.
Le franc-parler des pêcheurs rencontrés par la protagoniste donne à ce roman une touche très « gaspésienne ». Ce n’est pas une grande histoire ni un grand roman, mais sa lecture est fluide et on s’attache tout de même à Catherine et au sergent Moralès qui mène l’enquête. C’est une lecture agréable et facile dans laquelle on se prend à rêver d’être au bord de la mer. L’humour que l’on retrouve au fil de la lecture rend l’histoire savoureuse, tout autant que les images qu’évoquent les mots poétiques de Bouchard. Un roman à lire pour sa légèreté et l’odeur salée de la mer qui nous envahit à chacun des chapitres.
Deux romans succèdent Nous étions le sel de la mer, mettant en vedette de nouveau l’enquêteur Moralès ; La mariée de corail et Le murmure des hakapiks.
HAUTE DÉMOLITION
Jean-Philippe Baril Guérard. Éditions de Ta Mère. Mai 2021.
Ce roman n’a rien de commun à d’autres lus auparavant. J’avais aimé Le plongeur parce qu’il nous plongeait dans le côté sombre et inconnu des cuisines de grands restaurants. Haute démolition, quant à lui, nous fait découvrir l’arrièrescène de la vie des humoristes, pas toujours aussi parfaite qu’on se l’imagine. Derrière leurs jokes et leur joie de vivre se cache assurément tout un monde moins reluisant que Baril explore magnifiquement bien dans son quatrième roman. Relations de pouvoir, compétition, consommation d’alcool et de drogues et immense chagrin d’amour ; des sujets universels qui débordent largement de l’humour.
Haute démolition raconte l’histoire de Raph Massi, un jeune humoriste de la relève sortant de l’École nationale de l’humour qui vit à la fois l’ascension de sa carrière, mais aussi une dérape personnelle déclenchée par une immense peine d’amour. Le bonheur lui file entre les mains, tandis que son succès explose. En trame de fond, la compétition « amicale » entre deux amis humoristes, un clin d’oeil aux intenses soirées qui suivent les spectacles et un gros gros clin d’oeil aux dénonciations d’agressions sexuelles dans le monde de l’humour. Et il y a Raph qui tente de concilier son coeur fissuré, sa consommation et sa popularité.
Haute démolition, c’est en grande partie une histoire de rupture amoureuse racontée par « l’ex » de Massi, Laurie. La narration se fait au « tu ». Les premiers chapitres sont quelque peu déstabilisants et font en sorte que l’on développe moins d’empathie pour le personnage principal. L’histoire étant décrite par le regard de Laurie, on se rend compte que c’est la souffrance du jeune humoriste qui prend toute la place. Cette souffrance est à l’origine de sa « haute démolition ». En même temps qu’il devient de plus en plus connu et populaire, il devient de plus en plus accro à la drogue et à l’alcool. Peu à peu, il sombre dans la dépression. Il y a là une belle ironie du poker face… Gagner sa vie en faisant rire les gens alors que le principal intéressé ne va vraiment pas bien. Le personnage de Raphaël est tout de même attachant. On aurait juste le goût de le brasser comme on le ferait avec un·e vieil·le ami·e qui s’apitoie sur son sort, incapable de voir le positif.
N’OUBLIE PAS LA BEAUTÉ DU MONDE
Maude Michaud. Libre Expression. Août 2021.
Le quatrième roman de La parfaite maman cinglante est un roman qui fait du bien puisqu’il est rempli de résilience. Beau et plein de lumière malgré la lourdeur de certains thèmes : #moiaussi, l’abandon familial, la maladie. Par contre, l’entièreté de l’histoire de l’héroïne repose sur sa capacité à n’avoir jamais baissé les bras devant les tempêtes. Et c’est justement ce qui fait de ce roman toute sa beauté.
Élie raconte sa vie à sa fille, à qui elle donnera naissance sous peu. Or, les risques qu’elle ne puisse jamais la bercer, la regarder dormir, la voir grandir sont énormes puisqu’elle a un placenta increta pouvant causer sa perte. Dans ces courts chapitres, elle refait son parcours afin d’expliquer à sa fille d’où elle vient, mais aussi lui transmettre tout le positivisme qui l’habitait malgré toutes les barrières qui se sont dressées sur sa route.
C’est un roman qui nous pousse à nous rendre compte qu’il peut toujours y avoir pire, à toujours nous dire que « tout finit par passer », que le beau nous attend quelque part.
Une belle lecture déstabilisante qui nous apporte dans un univers méconnu !
Et ceux-là…
TOUT EST ORI : Décidément, je ne comprends par le succès de ce roman. Je n’ai assurément pas saisi ce qui en faisait un hit dans les palmarès. Rares sont les livres que je n’ai pas terminés… celui-ci en fait partie.
FILIBUSTE : Je n’ai pas aimé ni détesté. Mais si tu veux lire un livre qui fait du bien, passe au suivant. C’est une histoire de conflits familiaux entre une mère et ses filles, chacune faisait le procès de l’autre. Lourd.