Retour sur le festival Vues dans la tête de…

 

Autrui et Sur le ciment : courts et touchants

 

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par Jeanne Landry

 

Le 6 février dernier, le festival Vues dans la tête de Micheline Lanctôt présentait le court métrage Sur le ciment de Robin Aubert suivi du film Autrui, réalisé par la porte-parole Micheline Lanctot. Après les projections, le public a pu poser ses questions sur le travail des deux réalisateurs.

 

Dans Sur le ciment, un jeune homme a tagué son numéro de téléphone à différents endroits de la ville. Une vieille femme en mal d’amour finit par en trouver un et le compose. Leur rencontre fera naître une amitié peu orthodoxe qui dissimulera d’autres émotions plus troubles.
Dans Autrui, Lucie travaille dans une firme de sondage dont les questions tournent autour de l’utilisation des réseaux sociaux, lorsqu’elle tombe sur « la bête », soit un itinérant qui dort sur son balcon. Un soir où elle le retrouvera blessé devant sa porte, elle prendra la décision de le soigner et de l’accueillir chez elle, pour la nuit. Mais elle se rendra vite compte que son acte de pure générosité aura peut-être plus de conséquences que chacun ne le souhaiterait quand une relation aussi explosive qu’étrange naîtra entre eux. Le film présente peu de rôles et peu d’actions. L’histoire met en scène une intrigue simple, mais aux sentiments complexes. S’il y a si peu de personnages, c’est parce que le temps a été utilisé pour les exposer en profondeur et au grand jour à l’oeil averti du spectateur.
Ces deux films sont durs pour qui ne serait pas préparé, mais ils sont des plus gratifiants. Le voyage émotionnel au plus profond de soi et de la misère n’est pas toujours de tout repos. Mais si vous avez envie de coller votre solitude à ces compagnons d’infortune, notez bien que le message final de ces oeuvres reste l’espoir.

 

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Vues dans la tête de nos anges gardiens

 

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par Pierre-Alexandre Jean

 

L’après-midi du 7 février a débuté avec le court-métrage Maurice, de François Jaros. Avis aux émotifs : l’histoire raconte la vie de Maurice, âgé d’une cinquantaine d’années et atteint de la maladie de Lou Gehrig. Il met tout en ordre dans sa vie, vide son garage et avertit ses enfants non seulement de sa maladie, mais également du fait qu’il veut mettre fin à ses jours avant de dépérir. Après quelques péripéties, Maurice décide de remettre sa fin à plus tard. Le tout se termine sur un message d’espoir et d’acceptation de sa mort naturelle.

 

Arrêt sur le long-métrage L’Ange-Gardien, de Jean-Sébastien Lord. Il raconte la vie nocturne de Normand (Guy Nadon), gardien de sécurité. Un soir, un couple s’introduit sur son lieu de travail et commet un vol. Normand réussit à arrêter la jeune femme, mais les deux se blessent en déboulant violemment l’escalier. Déjà, un lien se crée quand elle décide de lui donner ses médicaments pour le coeur et de lui sauver ainsi la vie au lieu de s’enfuir. Dans les jours qui suivent, la jeune femme, Nathalie (Marilyn Castonguay), retourne le voir pour lui demander de l’aide. Malgré le fait que Normand est réticent à l’aider, même s’il ne l’a pas dénoncée à la police, ils se rapprochent au point où le spectateur se demande quel genre de relation ils entretiennent vraiment, ce que le spectateur découvrira avec surprise. On se demande qui, de Normand ou Nathalie, est vraiment l’ange gardien de l’autre. Les acteurs et les rebondissements sont à couper le souffle et le dénouement surprend à coup sûr. Les festivals Vues dans la tête de… fait vivre une expérience épatante. Souhaitons longue vie à ce festival hors du commun.

 

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Prendre le bon (Gui)bord

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par Eric de Montigny

 

Un an après son entrée à Hollywood avec The Good Lie, Philippe Falardeau revient à la charge avec Guibord s’en va en guerre. Ce film réunit Suzanne Clément et Patrick Huard pour la première fois depuis Mommy, de Xavier Dolan. Est-ce que le réalisateur parviendra à rester sur sa lancée ?

 

Steve Guibord est le député fédéral indépendant de Prescott-Makadew à Rapides-aux-Outardes, village du fin fond de l’Abitibi. Il fait face à un dilemme de taille alors qu’une députée ne peut voter pour l’envoi des troupes canadiennes à la guerre. Le député Guibord se trouve à détenir le vote décisif. Le premier ministre le convoque à Ottawa pour le persuader de voter en faveur de la guerre en échange d’un poste de ministre. Ne sachant pas pour quel côté prendre, il suit les conseils de son stagiaire venu tout droit d’Haïti, Souverain Pascal, et parcourt son comté pour recueillir l’opinion de ses électeurs. Mêlant très bien l’humour et le drame, Guibord s’en va en guerre parodie de façon cocasse le travail de député. Plusieurs éléments le confirment, comme le personnage du premier ministre (Paul Doucet) qui ressemble étrangement à Stephen Harper, celui du stagiaire qui propose sans cesse des solutions miracles, ou le côté égoïste des résidents du comté rural qui ne pensent qu’à leurs jobs. Le jeu de Patrick Huard ainsi que ceux de Suzanne Clément et de Clémence Dufresne-Deslières (connue pour son rôle dans Avant que mon coeur bascule) sont excellents et nous font réaliser l’ampleur et l’impact de la décision que Guibord doit prendre en arrivant à distinguer le bien du mal. Guibord s’en va en guerre est l’une des meilleures comédies québécoises de 2015. Elle exhibe l’envers du décor du travail de député sous un angle original. Elle fait taire certains détracteurs du cinéma d’ici en montrant qu’il en a encore dans le ventre. Philippe Falardeau peut dire « mission accomplie ».

 

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Une traversée esthétique Critique de Transatlantique

 

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par Jean-François Vallée

 

Traverser l’Atlantique à bord d’un cargo et suivre le quotidien des marins affectés au fret, c’est déjà une idée originale. Mais le filmer en plans souvent indirects en laissant chaque prise recomposer peu à peu le portrait d’ensemble d’instants fugaces du quotidien crée une atmosphère toute en étrangeté. Le résultat donne un film onirique et contemplatif qui parvient à recréer l’expérience presque mystique de l’homme confronté à l’immensité et à la puissance de l’océan.

 

E n aout 2013, le réalisateur Félix Dufour-Laperrière et ses frères Nicolas (à la direction photo) et Gabriel (prise de son) embarquent à bord du navire Federal Rideau à Anvers, en Belgique, pour une traversée de 30 jours qui prendra fin à Montréal. Dans ce premier long-métrage documentaire, le réalisateur tente de faire ressentir la solitude du temps qui s’étire langoureusement durant la longue traversée. Il a choisi de recomposer chaque activité des travailleurs de la mer en grossissant à la loupe chaque détail de leur quotidien, de leurs passetemps à leur rituel matinal. Il accumule les longs gros plans sur les mains des joueurs de pichenottes, ou il les filme en train de repeindre la cale pour mieux jouer ensuite au cricket… oui, au cricket. Dans un navire en fer ! L’emploi du noir et blanc, le mélange de sons et d’images, l’absence de traduction des propos en hindi, tout cela ballote les sens du spectateur, tant et si bien que la revue 24 images a qualifié le film de « film-transe qui se situe à la lisière du documentaire et du cinéma expérimental ». Pour mieux souligner l’aspect poétique de la traversée, le réalisateur a filmé le tout avec une caméra argentique, ce qui lui a permis de jouer sur les tons de gris et la lumière, certains plans rendant la mer semblable à du tulle brillant agité et ridé par les frissons de la mer. Jamais n’aura-t-on vu le quotidien de 21 marins aussi scruté à la loupe, et les instants ainsi croqués si minutieusement décomposés, puis recomposés avec art par le jeune réalisateur. Dans cette traversée par procuration, le spectateur est traversé par une gamme d’émotions, dont il ne ressort que quand il se met à apercevoir les côtes si familières du fleuve Saint-Laurent.

 

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