par Roselyne Leclerc
L’année 2015 nous a livré un flot d’informations désastreuses : le petit Aylan Kurdi retrouvé mort sur la plage a indigné la planète, les révélations concernant l’attitude de certains policiers à l’égard des femmes autochtones à Val-d’Or et j’en passe. L’ensemble de ces événements a confronté notre humanité, nous a poussés hors de nos sentiers battus et a suscité un questionnement profond concernant notre acceptation de l’autre.
Nous observons, impuissants, l’arrivée de nombreux réfugiés syriens, leurs regards reflètent à la fois leur joie d’avoir trouvé une terre d’accueil et les souvenirs des drames vécus tant dans leur pays que dans le périple qui leur a permis d’en sortir. Ils devront passer par un long processus d’adaptation, de guérison, sans oublier l’acquisition de nouvelles compétences : les us et coutumes, le français et parfois même un métier. Par nos comportements, nos attitudes, nous pouvons faciliter leur intégration à la société québécoise. Certaines communautés du Québec ont ressenti le besoin d’aller vers l’autre. Elles se sont mobilisées, elles ont amassé des vêtements, tricoté des tuques, repeint des logements. Le Québec, le Canada vit ses propres drames. Cette fois, cela se passe dans notre cour, chez nous ! Que dire des derniers événements survenus à Val-d’Or, qui nous ont appris que des femmes autochtones subissaient des violences, des sévices des policiers, qui devaient normalement les protéger ? Bientôt débutera une enquête nationale pour faire la lumière sur la disparition de 4 000 femmes autochtones, nombre avancé par l’honorable Carolyn Bennett, ministre des Affaires autochtones. Là aussi, investissons-nous, allons à leur rencontre, sans préjugés. Le continent africain est toujours aux prises avec des conflits politiques, territoriaux et ethniques dont les effets pervers s’abattent sur la population ; parlons de malnutrition, de manque d’accès aux services de santé, chômage endémique pour les jeunes. Plusieurs parmi nous s’engagent dans différents projets. Connaissons-nous notre partenaire, sa vision, ses valeurs ? Avons-nous analysé correctement les risques ? Ont-ils été exprimés adéquatement ? Nos intentions sont bonnes, louables. Avons-nous suffisamment sondé nos motivations ? Aller à la rencontre de l’autre peut être demandant. Ces drames humanitaires amènent une réflexion et le besoin, l’intention de rencontrer l’autre, de bâtir des liens significatifs avec lui, de jeter des ponts et de dépasser la simple tolérance. Bombardés d’images, de nouvelles et de brèves, nous pouvons ressentir un malaise concernant notre approche, nos actions, de nos gestes à l’égard de l’autre, fût-il Syrien, Malien ou Cri. On souhaite partir pour apporter notre pierre à l’édifice en construction, mais possédons-nous les outils adéquats pour intervenir ? Posons nous la question : « Que vais-je faire là-bas ? » En écho à la série d’articles de La Presse sur le « volontourisme », faisons en sorte de ne pas faire plus de mal que de bien. Nos actions auront-elles des retombées réelles ? Assurons-nous de mettre nos compétences, notre bagage professionnel au service de l’autre en utilisant les méthodes, techniques appropriées.
À la rencontre de l’autre : plus qu’un voyage, plus qu’une bonne idée.
Depuis plus de vingt-cinq ans, le Centre de formation à la coopération interculturelle (CFCI) du Cégep de Rivière-du-Loup s’investit dans cette préparation préalable, dans le développement des compétences favorisant des interventions efficaces et ciblées auprès de l’autre tant dans un contexte local que national ou international. La longue expérience du CFCI a démontré qu’une préparation adéquate en coopération interculturelle assure à l’apprenant une intervention efficace dans un secteur d’intervention professionnelle qu’il maitrise déjà et une intégration respectueuse auprès des communautés avec lesquelles il interagit. Mu par un souci d’actualisation aux nouvelles réalités, le CFCI a effectué des travaux auprès d’intervenants tant de la coopération internationale que de l’accueil des réfugiés ou de la solidarité autochtone afin de revoir les compétences du programme. Cette initiative a entrainé le programme de formation « Coopérant-Volontaire » à se présenter dorénavant sous un nouveau vocable, « Coopérant interculturel », reflétant mieux ses objectifs revisités et les modifications de ses compétences. Cette attestation d’études collégiales actualisée répond davantage aux besoins en matière de coopération interculturelle que ce soit au Québec ou dans un pays en développement. De plus, ce nouveau programme permettra d’obtenir un stage au Québec avec les Premières Nations ou de travailler avec les réfugiés et immigrants. Mais ce qui réjouit encore plus le CFCI du Cégep de Rivière-du-Loup dans l’offre de ce nouveau programme qui débutera le 2 mai prochain, c’est qu’il nous permettra, ici, au Québec, et ailleurs dans le monde, de tisser des ponts afin d’aller à la rencontre de l’autre.