Texte | Audrey Morin
Photo | Michel Lagacé
Depuis quelques mois, j’ai recommencé à écouter des CD. J’en emprunte à la bibliothèque, quatre nouvelles découvertes à la fois, chanson par chanson. J’ai recommencé à payer mes petites dépenses en argent comptant. Ça aide à conserver un minimum de compétences en calcul mental. J’ai recommencé à imprimer des documents sur du papier quand je dois les consulter souvent ou longtemps. J’ai aussi recommencé à utiliser un dictionnaire quand je veux vérifier l’orthographe ou la définition d’un mot et à demander l’avis des autres ou à prendre des chances quand j’ai des doutes à propos de quelque chose. Tout ça parce que les nuages sont de plus en plus gris.
Les données qu’on partage, les recherches qu’on fait, les choses qu’on consulte en ligne passent par des serveurs qu’on appelle communément clouds ou nuages. Ceux-ci, en plus de requérir une importante quantité d’énergie pour fonctionner, nécessitent l’utilisation de ressources issues de l’exploitation minière. Tout ça mis ensemble génère un flot invisible, mais bien réel, d’émissions de gaz à effet de serre, ce qui contribue à l’accroissement du réchauffement climatique.
Ironiquement, mais sans surprise, c’est grâce au numérique que j’ai découvert à quel point le numérique pollue. Le premier déclic s’est fait en 2014, en visionnant une série documentaire qui abordait la question de la sobriété numérique. Ensuite, j’ai vu des choses ici et là qui m’ont amenée à être plus conscientisée à l’impact environnemental de mes activités en ligne. Je prenais donc soin de supprimer mon historique de recherche, de faire du ménage dans mes courriels et sur mes réseaux sociaux, de réduire ma consommation de streaming… Avec la pandémie et la numérisation de notre quotidien qui s’est fortement accrue lors des longues et multiples périodes de confinement, je me suis mise à creuser davantage la question grâce à des recherches… en ligne, quoiqu’il y a eu un livre aussi : Internet ou le retour à la bougie d’Hervé Krief.
À travers cette quête, j’ai notamment découvert qu’après 27 écoutes d’un album, le format physique devient plus écologique que le format numérique, que chaque recherche faite sur Google génère 10 grammes de CO2… J’ai aussi appris que nous pouvons mener de nombreuses petites actions pour contribuer à réduire la pollution numérique : éteindre notre caméra pendant une visioconférence, regarder des vidéos en basse résolution, prioriser les appels aux courriels, conserver plus longtemps nos appareils numériques, enregistrer les sites qu’on consulte souvent dans nos favoris, etc. Bref, une grande diversité de solutions est à notre portée afin d’éviter que les nuages ne noircissent.
