par Marcel Méthot, enseignant et slameur
Les 18 et 19 mars se tiendra à l’UQAR le premier colloque régional organisé par la Table de concertation sur les réalités masculines du Bas-Saint-Laurent. Ayant pour titre « Chantier sur les réalités masculines : Quel avenir pour les hommes en région ? », cet évènement réunissant des organismes communautaires, des chercheurs de l’UQAR ainsi que des intervenants du réseau de la santé et des services sociaux, se veut un espace de réflexion, d’échanges et de formations sur les préoccupations des hommes quant à leur vécu et à leurs besoins.
La masculinité, selon le dictionnaire Larousse, est l’« ensemble des comportements considérés comme caractéristique du sexe masculin ». Être un homme, c’est donc se comporter comme un homme. C’est simple, non ? Ce le serait si nous n’étions pas des êtres sociaux, culturels, symboliques condamnés à définir notre identité sur des bases beaucoup plus complexes que celles associées à nos seules dimensions « naturelles ». Ce serait simple s’il existait un consensus universel et intemporel sur les bons comportements à adopter pour assumer sa masculinité. Ce serait si simple si… Il n’est pas difficile, par exemple, de déterminer les attributs biologiques associés à l’individu « mâle », et je me garderai ici d’insister sur ces derniers, de peur d’insister avec trop d’insistance sur ce sur quoi il serait inopportun de trop insister. Or, il s’avère beaucoup plus ardu de dessiner les contours de ce que c’est que d’être un « homme » aujourd’hui, en 2016, au Québec. L’homme, en réalité, est une entité imaginaire. La masculinité, en ce sens, ne peut pas se définir en proposant la liste des dix caractéristiques objectives que doit posséder celui qui veut prétendre être un « homme ». Ce serait simple, non ? Voici la liste en question :
1) Un vrai homme ne pleure pas
2) Un vrai homme aime regarder le hockey
3) Un vrai homme est capable des changer des essuie-glaces
4) Un vrai homme est attiré par les femmes
5) Un vrai homme déteste faire le ménage
6) Un vrai homme est ambitieux professionnellement
7) Un vrai homme est plus intéressé au sexe qu’à l’amour
8) Un vrai homme est capable de se stationner de reculons
9) Un vrai homme aime les films d’action
10) Un vrai homme ne subit jamais de violence conjugale
Ce serait simple, mais ça ne fonctionne pas de manière aussi triviale que cela. Et c’est là que la question de la masculinité devient très intéressante, voire passionnante. Mais ce n’est pas simple. L’homme est une entité imaginaire, en ce sens que la masculinité est un construit social. Elle est évolutive, instable, non consensuelle, irréductible, explosive, caléidoscopique, floue, riche. La masculinité est le reflet toujours à recomposer d’un combat éternel entre différents imaginaires sociaux. Jamais nous ne pourrons dire une fois pour toutes que nous pouvons identifier l’ensemble des traits et caractéristiques relatifs à la masculinité. Jamais nous ne pourrons clamer : voilà ce que c’est un vrai homme ! La masculinité se définit en outre dans une triple relation : relation à soi, à l’autre, au monde. Être un homme, c’est accepter qu’il faille apprendre à se connaitre ; c’est accepter que ce soit dans la relation à l’autre qu’on apprend à se connaitre ; c’est reconnaitre que l’on se reconnait dans la relation entretenue avec le monde qui nous entoure et qui nous définit à son tour en même temps qu’on apprend à le connaitre. Réfléchir à la masculinité implique donc, et cela s’avère crucial, de réfléchir du même coup à la féminité. Se demander « qu’est-ce que c’est qu’être un homme ? », c’est se demander « qu’est-ce que c’est qu’être une femme ? ». Plus encore, c’est réfléchir à l’incontournable questionnement sur les interactions entre deux entités imaginaires, l’homme et la femme, tous deux en relation avec un monde imaginaire qui prend réalité dans leurs interactions. Pour dire simplement, la masculinité a besoin de la féminité pour se définir. Cela va de soi !