texte Marie-Amélie Dubé | photo Catherine Roy
Je suis grosse. J’ai toujours trouvé cet adjectif dégoûtant. Peut-être parce que je me suis déjà fait dire : « Eille, la grosse, prends ton trou ! » ou « T’es belle pour une grosse » ou « Toi, la grosse, tu ne peux pas comprendre mon problème ». J’ai toujours préféré le qualificatif « ronde ». Je suis ronde. Ça me paraît moins pire, non ? Plus gracieux, poétique, plus doux. J’ai pu passer au moins 30 ans de ma vie à me sentir mal dans mon corps, jalouse des autres. À cacher mon corps en refusant d’aller à la piscine ou de manger une poutine en public. Aujourd’hui, je m’entraîne trois fois par semaine (à manger de la poutine en public, LOL !), je pèse 105 livres de muscles (plus de la moitié de mon poids), je nourris sainement mon corps et je médite pour lui donner le droit de digérer tout ce que la vie lui fait vivre. Je suis certainement plus en santé que bien des personnes minces et, pourtant, je suis grosse. Quand je lis ou entends les commentaires violents, vulgaires et barbares qui ont fusé concernant Safia Nolin, ça me dégoûte plus que le mot « gros ». La grossophobie ou le fat shaming est bel et bien réel. Heureusement, il a de plus en plus de femmes au Québec comme Manal Drissi, chroniqueuse, Julie Artacho, photographe, Gabrielle Lisa Collard, créatrice du blogue Dix octobre, qui font avancer la cause de la diversité corporelle en montrant des corps multiples. De plus en plus de mannequin et d’athlètes taille plus apparaissent et se font entendre[1].
Quand on reçoit une lettre par la poste, ce qui nous intéresse, c’est ce qui se trouve à l’intérieur. Le corps, c’est l’enveloppe. Nos valeurs, nos idées, notre comportement, c’est la lettre. Votre intérieur transporte votre extérieur. Un intérieur qui rayonne fait un extérieur lumineux. Anacha, Sophie, Sylvain, Mike, Myriam, Marie-Pierre, Roxanne et Andréanne, chapeau d’avoir osé prêter votre corps si généreusement pour la cause de la diversité corporelle. Merci pour vos témoignages. Merci mille fois à Catherine Roy d’avoir si bien enveloppé l’espace des corps offerts à sa lentille. Chacun m’a signifié à quel point il s’était senti en confiance et en sécurité avec toi, malgré sa vulnérabilité. La Rumeur du Loup tient à préciser qu’aucune retouche dans Photoshop n’a été faite sur les photos réalisées pour ce dossier. Regards pluriels sur la diversité corporelle se veut être une prise de conscience sur la beauté des corps, peu importe leur forme. La diversité, c’est ce qui rend notre monde si beau et intéressant. Nous sommes tous uniques. Acceptez la différence, car vous en faites aussi partie ! Aussi à lire dans cette édition, un dossier sur votre télé citoyenne MAtv !
[1] Big Fit Girl, un livre à lire de Louise Green, le blogue La backpackeuse taille plus de la randonneuse québécoise Édith Bernier.
*Vous aimeriez participer à La Rumeur du Loup ? Le magazine de décembre 2018 portera sur DES RENCONTRES INTERGÉNÉRATIONNELLES et aura pour titre DES HISTOIRES PLEIN LA TÊTE. Vous avez une histoire à partager ? Envoyez-nous votre article de 500 mots, photo, dessin, poème ou vidéo au journal@rumeurduloup.com d’ici le 20 novembre. Vous avez d’autres suggestions de sujet ? Écrivez-nous !
Beau grand texte, qui me semble refléter une grandeur d’âme et un grand cheminement personnel et social. C’est un grand texte! 😉 nice job.