texte François duTemps
Électeur.rice.s, nous nous excusons d’avoir choisi de laisser une dette écologique plutôt qu’économique à nos petits-enfants, tous les petits-enfants. À l’avenir, votons en fonction du sérieux des programmes écologiques des partis.
Citoyen.ne.s, nous nous excusons d’avoir laissé nos indigent.e.s dirigeant.e.s penser à leur réélection aux dépens d’une terre viable pour nos petits-enfants, tous les petits-enfants. À l’avenir, répudions les dirigeant.e.s dont les actions négligent la possibilité pour nos enfants et petits-enfants d’habiter une terre viable.
Capables de lucidité, nous nous excusons d’avoir pourtant si peu crié au scandale de la bêtise comptable à courte vue. À l’avenir, tenons compte de l’impact environnemental à long terme des projets envisagés.
Capitalistes, nous nous excusons d’avoir, par notre cupidité, creusé l’écart entre les riches et les pauvres. Désormais, une société juste dans un environnement sain devient notre priorité.
Producteur.rice.s, nous nous excusons d’avoir contribué à dégrader la planète. À partir de maintenant, prévoyons le cycle complet de tous nos produits, de la fabrication à la récupération et au recyclage en fin de vie utile.
Éducateur.rice.s, nous nous excusons d’avoir menti aux enfants, aux petits-enfants, en leur laissant croire que, si l’on poursuit sur la même voie, le meilleur est à venir. À l’avenir, montrons-leur les limites de notre mode de vie ; par notre exemple, enseignons-leur à lutter contre le gaspillage en recyclant, réparant, récupérant, réutilisant tout ce qui peut l’être.
Parents, nous nous excusons d’avoir veillé à intégrer nos enfants, et ceux qui suivront peut-être, à ce mode de vie non viable. Désormais, méritons leur affection en nous montrant responsables vis-à-vis des enfants qu’ils auront le choix de mettre au monde.
Consommateur.rice.s, nous nous excusons d’avoir pensé à nos choix sans penser à nos petits-enfants, tous les petits-enfants et aux choix qu’ils ne pourront plus prendre. À partir de maintenant, vivons selon nos moyens et leurs moyens.
Citoyen.ne.s du monde, nous nous excusons d’avoir cru et laissé croire que le modèle humain occidental du.de la bon.ne producteur.rice/ consommateur.rice était le modèle à suivre. Le modèle à suivre consiste plutôt à vivre selon les moyens fournis par notre environnement maintenant et pour toujours.
Occidentaux, nous nous excusons d’avoir propagé cette idée folle de « voir grand », d’« aller plus loin », toute cette folie de croissance, de pseudo-développement, toute cette enflure basée sur un appétit insatiable. Désormais, chaque communauté, de la plus petite à la plus grande et selon ses possibilités, apprend à vivre à l’intérieur de sa niche écologique.
Vivant.e.s parmi les vivant.e.s, nous nous excusons d’avoir vidé la planète, comme si ça n’avait pas d’importance. Maintenant, nous savons que les autres espèces sur terre ne nous sont pas subordonnées ; diminuons graduellement notre empreinte écologique jusqu’au seuil de renouvellement des ressources planétaires.
Êtres conscient.e.s et responsables, nous nous excusons de ne pas avoir vu la pauvreté de nos choix de société. Nous savons maintenant que notre mode de vie est insoutenable et nous savons quoi faire ; chaque geste compte, aussi petit soit-il.
Nous nous excusons d’avoir cru que nous n’avions pas le choix. Désormais, ne faisons plus semblant.
Nous nous excusons, parce que c’est la modestie qui le demande et que, ce qui nous manque, c’est la modestie. Nous savons que nous ne sommes qu’un souffle sur terre.
Je m’excuse donc d’avoir endossé tout ça, par ma parole, mon silence, ma vie, mon engagement. Je ne me tairai plus.
Je m’excuse d’avoir été si peu radical, d’avoir été si compréhensif, si tiède, si gentil, si rien du tout au fond. Désormais, je serai sans pitié, sans limites, sans ménagement.
