Texte Florence Jobin, élève de l’École secondaire Chanoine Beaudet
On m’a demandé de parler de mes parents, mes parents entrepreneurs. C’est une réalité assez peu vécue, apparemment. Mes deux parents sont séparés et ont chacun leur entreprise. Ma mère a un dépanneur de village-épicerie fine à Mont-Carmel. Mon père possède cinq restos à Québec. Leurs entreprises roulent à cent mille à l’heure et c’est génial, mais parfois dur aussi. Ils n’ont pas chômé pour en arriver là.
Quand j’avais 7 ans, j’habitais avec ma mère à Saint-Pascal et mon père ouvrait son premier restaurant « L’affaire est Ketchup », à Québec. J’allais le voir environ aux 3-4 fins de semaine. Je passais la majorité de mon temps à l’aider dans son resto. Le soir, ma belle-mère me gardait.
Je connais le monde de la restauration comme le fond de ma poche. La preuve : à 8 ans, j’ouvrais des oursins comme une pro. Par contre, je ne passais pas beaucoup de temps avec mon père non plus. Il devait construire son rêve et ça lui prenait beaucoup de son temps. Être une enfant de la restauration m’a par contre apporté beaucoup de choses. Grâce au travail de mon père, j’ai connu plein de gens avec toutes sortes de personnalités, d’opinions et de façons d’être. Graviter dans un monde d’adulte m’a aussi permis de gagner une maturité assez élevée. Et bien sûr, la passion de mon paternel m’a apporté un amour incroyable pour la bonne bouffe ! Aujourd’hui, mon père a cinq restos qui roulent bien et il travaille beaucoup moins. On passe beaucoup plus de temps ensemble. Il peut m’apprendre plein de choses sur la bouffe et sur la gestion d’une entreprise. Très pratique quand à 20 heures, j’ai besoin de savoir comment faire cuire deux kilos de poulet !

Quant à ma mère, en 2015, elle travaille à l’« Épicerie Chez Daniel ». En 2016, elle l’a achetée avec Kathleen, sa partenaire d’affaires. Elle s’accomplit dans cette entreprise qui n’a cessé de croître. Comme mon père, elle a énormément travaillé à la réussite de son projet en y sacrifiant ses soirs et ses fins de semaine. Bien sûr, en tant qu’ado, je ne pouvais que me réjouir de ce temps, seule à la maison. Or, après un certain moment, j’avais hâte qu’elle rentre. (En passant, elle ne rentrait pas si tard que ça ! Je ne suis pas une enfant abandonnée !) Son travail la rendait vraiment heureuse et c’est là toute la beauté d’être entrepreneur.e ; faire un travail qui nous rend heureux et qui nous permet de nous accomplir. Maintenant, son entreprise se porte mieux que jamais et elle peut rentrer en fin d’après-midi. Bien sûr, lors de dures journées ou lorsqu’un employé est absent, elle travaille plus. L’ambiance est moins agréable et parfois, je croise les doigts pour qu’elle ait eu une bonne journée. Heureusement, ma mère réussit presque toujours à mettre ses soucis reliés au travail derrière elle lorsqu’elle rentre à la maison, même si la journée a été éprouvante. Elle est extrêmement débrouillarde et grâce à son entreprise, elle a acquis beaucoup d’expérience ; ce qui m’aide dans ma propre carrière d’entrepreneure. Elle m’a aidée lorsqu’un gâteau était dû pour le lendemain, mais qu’il était raté ou lorsque je devais calculer le prix des ingrédients, mais qu’Excel m’était inconnu.
Mes parents m’ont transmis l’amour et le don de l’entrepreneuriat, je crois ! Ils m’ont montré toutes les facettes, les belles et les moins belles. Ce gène qu’ils m’ont légué m’a d’ailleurs poussée à ouvrir le « Bistro » cette année dans mon école secondaire. Puisqu’il n’y a pas de service de cafétéria, j’offre des repas économiques, variés et santé pour combler ce besoin. Dans ce projet, je peux aussi faire une bonne action pour l’environnement, valeur très importante pour moi. Je n’utilise aucune vaisselle et aucun ustensile jetable et j’essaie également d’acheter les produits les plus écologiques et les moins emballés.
En raison du legs de mes géniteurs, j’ai une vision réaliste du projet dans lequel je m’investis. Cependant, j’ai quand même des papillons dans le ventre quand j’y pense. Grâce à tout ce qu’ils ont vécu, ils m’accompagnent dans cette montagne immense, mais si excitante qu’est l’entrepreneuriat. J’invite d’ailleurs le personnel et les élèves de l’école à m’encourager dans mon parcours et à prendre maintenant, le jeudi midi, un repas santé au Bistro de l’école.
(J’ai le droit de me faire de la pub, non?)!
Belle histoire de famille éclatée et inspiration à la clé, bravo!