Comment fonder une famille quand on est deux mamans?

Texte | Camille Beaulieu & Camille La Rochelle
Photo | Orange Pomme Photographie

Pour un couple homosexuel, de filles particulièrement, il y a plein de façons de fonder une famille. L’adoption, la procréation assistée en clinique (insémination artificielle et in vitro), l’insémination artisanale, choisir laquelle portera l’enfant, etc. Beaucoup plus de choix que pour un couple hétérosexuel, quand on y pense ! Pour nous, on le voit comme une chance !

C’était clair qu’on voulait commencer notre famille en portant notre enfant. Étant donné qu’il·elle aurait nécessairement les gènes d’une personne extérieure à notre couple, on souhaitait vraiment qu’il·elle puisse rencontrer cette personne et avoir un lien avec elle. Notre enfant se rendra compte assez vite qu’il faut plus que deux mamans pour faire un bébé, et s’il·elle sent le désir de connaître ses origines génétiques, c’est important pour nous qu’il·elle puisse le faire. Après plusieurs discussions, lectures, recherches sur Internet, l’insémination artisanale est devenue un choix tout indiqué pour nous. La possibilité de connaître le donneur et le désir de garder la création d’un nouvel être humain la plus naturelle possible, et donc en dehors d’un cadre médical, allaient aussi en ce sens.

Le grand défi : trouver le géniteur parfait ! On ne s’était pas fait une grande liste de critères comme on peut se l’imaginer. Notre principale préoccupation, c’était de bien s’entendre sur son rôle une fois que l’enfant serait
là. Il ne sera pas un père, mais jouera plutôt un rôle d’oncle ou de parrain, qui peut être proche de l’enfant sans avoir de responsabilité parentale. En faisant des recherches, nous avons découvert que la Coalition des familles LGBT+ a mis à la disposition de tou·te·s un guide légal pour les parents de la communauté LGBT+. On y a trouvé l’information sur l’aspect légal de ce genre de don, et comment faire un contrat pour nous protéger et protéger également le donneur. Il s’engage à ne pas réclamer sa paternité, et nous nous engageons à ne jamais lui demander de pension alimentaire, tout en spécifiant que le don est fait sans relation sexuelle et gratuitement aux fins de notre projet parental.

En parlant de notre projet autour de nous, une amie nous a mises en contact avec un ami à elle qui s’était dit intéressé à aider d’autres couples à avoir des enfants. Nous l’avons rencontré dans ce cadre en mars 2020, tout juste avant le début de la pandémie. Aux premiers abords, il semblait intéressé, mais les restrictions sanitaires ont mis un frein à l’avancement du processus. Nous nous sommes revu·e·s en juin 2020. Le projet avait eu le temps de mûrir dans sa
tête, et quelques nouvelles interrogations de surgir. Nous avons pris le temps d’en discuter, et lors de la rencontre suivante, il nous annonçait qu’il acceptait d’être notre donneur ! Quelle joie !

Nous avons donc commencé les essais à la maison en juillet 2020. Pour savoir comment procéder, nous avons regardé sur divers sites Internet de sources plus ou moins fiables. En fait, les meilleures informations que nous avons trouvées venaient de forums. Aucune institution officielle ne semblait vouloir donner des informations sur l’insémination artisanale. On a donc fait au meilleur de nos connaissances, en espérant que ça fonctionne. Depuis le début de notre relation, c’était clair pour nous que ce serait Camille B. qui porterait le·la premier·ère enfant. On peut dire qu’au premier essai, c’était un peu drôle, mais de mois en mois, une petite routine s’est créée, puisque malheureusement, les règles revenaient chaque fois… C’était difficile de savoir si les échecs étaient causés par la technique artisanale ou juste par le hasard. Pour un couple hétérosexuel, il faut attendre jusqu’à un an pour pouvoir faire des démarches en fertilité. Néanmoins, c’était dur sur le moral que ça prenne plusieurs essais, surtout qu’une troisième personne était impliquée dans le projet.

En décembre 2020, après six tentatives infructueuses d’insémination artisanale, nous avons décidé d’utiliser notre joker : un second utérus. Nous avons commencé la course à la grossesse ! Nous avons pris le temps de bien réfléchir à cette tactique et avons convenu d’essayer à tour de rôle, en faisant très attention pour ne pas tomber enceintes en même temps ! Le suspense ne dura pas longtemps, car il ne fallut qu’un seul essai pour que Camille L. R. tombe enceinte. Même si ça ne pouvait théoriquement pas être une « grossesse surprise » dans notre cas, nous avons tout de même été ahuries de voir le test de grossesse positif après un seul essai !

Notre futur bébé (Petit Panko) est attendu pour octobre 2021, et la grossesse se passe sans anicroche jusqu’à maintenant. Après d’autres lectures et recherches, nous avons décidé de tenter notre deuxième joker et d’essayer le co-allaitement ! Camille B. est en train de suivre un protocole avec des médicaments pour simuler une grossesse et développer ses glandes mammaires. Bientôt, la stimulation mécanique avec un tire-lait sera débutée pour créer une production de lait. Le but n’est pas d’allaiter 50-50, mais plutôt d’offrir une à deux tétées par jour, afin d’aider Camille L. R. et de partager ce lien spécial avec Petit Panko. Le nombre de mamans qui nous ont dit qu’elles auraient aimé que leur conjoint puisse allaiter aussi ! Sans mettre trop d’attentes là-dessus, on va quand même tenter le coup. C’est tout
de même une chance de pouvoir allaiter toutes les deux !

Pour la suite, si Petit Panko ne nous en décourage pas trop, nous savons déjà que nous souhaiterions
avoir plusieurs enfants. Si le donneur est toujours d’accord, et que son contexte de vie le lui permet, nous aimerions procéder avec lui encore une fois, pas tant pour l’aspect génétique que pour le rôle sur lequel on s’entend. De toute façon, la famille peut tellement prendre le sens qu’on lui donne aujourd’hui, lien génétique ou pas. Si le contexte est différent, nous retournerons voir toutes les options qui s’offrent à nous pour choisir comment compléter notre clan !

À propos de Marie-Amélie Dubé

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